A la francaise
Finalement je ne decolle plus de Shanghai. Au debut j'avais prevu de passer seulement 3 jours, mais Paul me couve trop. Demain on va visiter Tongli : ville d'eau et de venelles (comme ils disent dans le guide). C'est la Venise du sud de la Chine. Y'a plein de petits ponts ou les amoureux aiment a se mirer dans l'eau. Ah ! Les amoureux de Shanghai ! Je veux leur dedier une tribune. Bien sur, il faut remettre les choses dans leur contexte. Cela fait trois ans que je vis dans une societe, celle de Taiwan, ou les rapports amoureux sont "rosifies". Tout est romantique jusqu'a l'ecoeurement. Mes amies taiwanaises peuvent le confirmer. On offre des petits nounours en bouquet. Mais a Shanghai... on a le sang chaud et on se roule des galoches au milieu de la rue. Vive la Chine liberee !
Ceci etant dit, cette apres-midi j'ai decouvert un tout autre visage de Shanghai. En 1849, la Chine concede a la France une superficie de 66 ha en plein coeur de Shanghai. Et que font-ils de cette superficie ? Quelque chose dont les expats auront toujours du mal a se remettre, le petit Paris. Vous me croyez si vous le voulez, mais ils ont bien reussi leur coup. Petites rues ombragees avec boutiques et cafes. La concession francaise est vraiment un quartier agreable. Mais ce qui fait son charme, plus que la disposition des rues a la francaise, les "Lilongs", equivalent des Ruitongs a Pekin. Habitats populaires Shanghaiens typiques. Pour ceux qui connaissent, on peut les comparer aux dedales de rues de Ho Chi Minh ou les alentours des temples a Bangkok, ou vivent les moines. Pour ceux qui ne connaissent pas encore (y'a les photos), souvent cela commence par une ruelle, qui mene dans un dedale de rues, a l'abri de l'agitation des commerces.
L'architecture y est plutot ancienne. L'ambiance particulierement calme et decontractee. Le linge pend au fenetre, et un peu partout d'ailleurs (on dirait le Sud). Ce qui me fait dire que leurs sous-vetements ne sont pas propres a reveiller les fantasmes(je pense plus particulierement a ce kangourou rouge aux elastiques plus que distendus). De belles couleurs ocres, vertes, bleues, jaunes. Une oasis dans cette mer d'immeubles modernes. Bizarrement cela s'integre parfaitement au paysage de la ville.
J'ai aussi fait un tour dans les parcs. Pas mal de monde, meme en pleine journee. A Shanghai certains prennent vraiment le temps de vivre. Des joueurs inveteres de Majhong, de cartes, d'echecs... mais aussi des lecteurs. Pendant la periode communiste, les journaux etaient affiches. A cause de la censure notamment. Aujourd'hui encore. Les Chinois lisent, debout, les pages des journaux epinglees sous verre, alors meme qu'on trouve des kiosques a chaque coin de rue.
Je suis restee subjuguee devant deux Taijichuan men. Ils pratiquaient avec une epee en bois. L'un d'eux etait un maitre. Etait-ce une danse ? Etait-ce une pantomine ? Etait-ce une sorcellerie ? Ou bien tout a la fois. Un mouvement de bras, qui en d'autres circonstances, serait un simple deroule partant de l'epaule jusqu'a la main, prenait dans le corps de cet etrange humain, une tout autre dimension. L'epaule, le bras, l'avant-bras, le poignet, la main, chaque partie semblait etre animee d'une etrange force. Il reussissait a traduire l'essence meme du mouvement. Je repense a ce que me disait souvent Thierry (un futur maitre de Kung Fu!). Il faut commencer par oublier tout, pour retrouver l'essence meme, la spontaneite et la purete du mouvement. Si j'arrivais a faire ca avec l'image ! Retrouver l'essence meme de l'image.
En attendant il faut repeter, pratiquer et encore repeter. J'ai pratique un peu aujourd'hui, quelques photos a voir dans l'album "French concession".